Un ange frappe à ma porte [Michael & Seeliah]

Le soleil avait rejoint les profondeurs de la terre depuis peu quand il atteignit la petite ville de Salem. Cela faisait très longtemps qu’il n’y avait plus mis les pieds, et elle avait bien changé. L’aura de mystère qui l’y avait attiré tant d’années auparavant avait presque disparu, remplacée par les fumées des gaz d’échappement, les néons et le béton. Comme c’était charmant. La ville révélait enfin sa vraie personnalité, faite de trahison, de vénalité et de soif de sang. Peut-être y trouverait-il enfin un peu de repos. Et de quoi assouvir sa soif.

Il déambulait dans le centre-ville, l’endroit le plus fréquenté en soirée et donc un terrain de chasse et un lieu d’information de premier ordre. La traque pour les sorcières, s’il en existait toujours dans cette ville, allait pouvoir commencer. Et tout chasseur qui se respecte sait qu’il doit se camoufler pour attirer sa proie. C’est pourquoi il avait choisi une tenue assez chic, mais pas trop, afin de ne pas intimider. Vêtements griffés et pas trop voyants, idéal pour faire passer le message fortuné, mais pas arrogant, ouvert à la discussion avec tous et cultivé malgré tout .

Il s’était nourri plus tôt dans la soirée, dans un motel assez éloigné de la ville pour ne pas attirer l’attention de la police locale. Il avait ainsi l’esprit plus clair et pouvait se contrôler plus facilement. Il put donc se permettre de rentrer dans la boîte de strip-tease locale, The Cabaret sans se soucier de voir ses crocs le démanger. Ah, ces démonstrations de déprave dans toute leur splendeur ! Ils savaient comment présenter la marchandise, dans cet endroit ! Il pénétra dans le bâtiment et laissa le temps à ses yeux de s’habituer à la lumière des spots de la scène avant de se diriger vers le bar. Une fois assis, il observa les autres visiteurs de l’endroit; c’est toujours plus prudent quand on débarque en territoire ennemi. Il commanda un verre de whisky, un Glenfiddich 18 ans d’âge, une combinaison parfaite de fruits exotiques, d’arôme de chêne et une note de sherry. Il paya sa consommation et observa du coin de l’œil les autres clients, tout en feignant d’être absorbé par le spectacle sur la scène.

Il aperçut une jeune fille blonde qui entrait dans l’endroit. *Étrange, elle est bien jeune pour fréquenter un tel endroit ! C’est peut-être le début d’une piste.* Il avait appris au long de toutes ces années que si quelque chose semble étrange, cela l’était probablement. Intrigué, il se dit qu’il avait possiblement trouvé là une descendante de ces maudits sorciers; quelqu’un capable de rester jeune, grâce à des potions peut-être ? Il n’y avait qu’une façon de le savoir. Une fois qu’elle se fut installée à une table, il s’approcha et s’adressa à elle :
« Vous semblez bien jeune pour fréquenter un tel endroit. Ne devriez-vous pas vous trouver chez vos parents à cette heure tardive ? », dit-il en esquissant un léger salut. « Excusez mes manières, je me prénomme Michael, pour vous servir. Puis-je me joindre à votre table ? »

Michael & Seeliah
«Dans chaque petite chose, il y a un ange.»
[Georges Bernanos]

Le cabaret était sans aucun doute un des lieux préférés, voir le lieu préféré de Seeliah ici à Salem. D’ailleurs, elle qui habitait le corps d’une adolescente de 16 ans, s’était un vrai challenge qu’elle adorait relever à chaque fois, d’arriver à pénétrer dans cet endroit interdit pour les jeune gens de son "âge". Défi qu’elle arrivait à relever brillamment à chaque fois, à tel point que ce n’était plus vraiment difficile d’y pénétrer à présent. En effet, elle avait réussi avec succès à se mettre le vigile dans la poche, en lui faisant un peu de charme. Cependant, il arrivait que ce n’était pas l’habituel qui soit posté à l’entrée et dans ces cas là, l’ange appréciait de devoir redoubler d’effort pour se faire accepter.

Ce soir, Seeliah n’aura pas le plaisir de s’amuser pour devoir entrer, le vigile en post était celui qui avait désormais l’habitude de la voir régulièrement les weekends et parfois même les autres soirs. Elle le salua, accompagnant sa démarche lascive d’un grand sourire aguicheur, comme à chaque fois qu’elle passait là. Tout chez elle n’était que pure provocation, du maquillage outrageant aux habits excentriques et sexy à souhait. Pour quelqu’un ne connaissant pas Savannah et l’âge réel de l’adolescente, elle pouvait aisément passer pour une jeune femme de 18 ou 19 ans, tant sa façon de s’habiller et de se maquiller était à mille lieues de ce qu’on s’imagine pour une gamine qui venait tout juste de fêter son seizième anniversaire.

Plus que sexy, l’ange appelait à la débauche, à la luxure. Elle suscitait le désir et l’envie auprès de la gente masculine qui se trouvait sur son passage. Seeliah appréciait de se faire regarder, siffler de cette façon, elle aimait attirer les regards des hommes et attiser la jalousie des femmes, c’était un jeu dont elle raffolait et rien ne pouvait lui faire plus plaisir que d’avoir le choix de ses prétendants pour finir la soirée. Cela ne voulait en aucun cas dire que l’ange était facile, bien au contraire, plus elle avait de choix et plus elle était exigeante. Mais avant toute chose, première étape : aller se chercher un verre. Elle déambulait gracieusement, la démarche féline entre les clients de la boîte lançant quelques regards langoureux de-ci, de-là, quand ses yeux s’arrêtèrent sur un homme à l’allure bien mystérieuse. Elle se commanda un Blue Lagoon, son cocktail préféré, mélange de vodka, de curaçao et de citron, puis alla s’asseoir à une table libre, reprenant inlassablement le même jeu. Une fois confortablement installée, elle reporta son attention sur l’homme qui avait attiré son regard près du bar. Mystérieux, élégant, distingué, tout à fait son type d’homme. Alors qu’il s’approchait d’elle, elle lui souriait.

- Ne vous fiez jamais aux apparences, elles sont souvent trompeuses. Mais je vous en prie asseyez-vous.

L’ange n’allait pas s’arrêtait au fait qu’il ait remarqué le jeune âge de son hôte, trop heureuse de le voir venir l’accoster. Cependant, elle hésitait sur le choix à adopter, donner son vrai prénom ou donner celui de la jeune demoiselle qui lui prêtait gracieusement son enveloppe charnelle ? Elle devait se méfier à qui elle donnait sa réelle identité, spécialement tant que cette personne ignorait sa vraie nature. En parlant de vraie nature, l’homme face à elle ne semblait plus vraiment humain non plus, mais elle était bien incapable de dire en cet instant ce qu’il pouvait bien être, elle sentait seulement que ce n’était pas un démon. Aussi opta-t-elle pour la sécurité dans un premier temps.

- Enchantée Michael, moi c’est Savannah. Vous êtes nouveau en ville ? Je ne vous ai jamais vu par ici en tout cas.

Seeliah lui souriait, ses yeux aussi bleus que le liquide que contenait le verre qu’elle tenait en main, plongé dans le regard ténébreux de l’homme assis à ses côtés. Elle n’avait pas pour habitude de baisser le regard face à autrui, bien qu’en cet instant elle fut tenté de le fait tant Michael l’intriguait et la déroutait rien que par sa carrure et sa prestance. Il ne faisait plus aucun doute pour l’ange qu’il n’était pas humain.

Michael prit une chaise et s’assit en face de Savannah.

« Merci. » Il accompagna sa réponse d’un joli sourire, un chasseur se doit d’hypnotiser sa proie pour lui éviter de filer sous son nez. De plus, la demoiselle était, à y regarder de plus près, jolie, très jolie même. S’il ne trouvait pas de piste, il y gagnerait peut-être un casse-croûte ou du moins une soirée intéressante. Il avait tout à y gagner.

« Oui, je viens d’arriver. Je travaille pour le National Park Service et ils m’ont envoyé en renfort pour surveiller les forêts autour de la ville. Quelques touristes s’y seraient perdus et ils ne veulent plus que ça se reproduise. Vu comme c’est parti, je serai coincé ici un petit bout de temps, je pense. »

Ce qu’il ne disait pas, c’est qu’il s’était personnellement occupé de faire disparaître ces quelques touristes, afin d’être muté dans la ville. Le National Park Service connaissait ses qualités de traqueur et de tireur et l’avait choisi pour venir à bout de la bête ayant causé ces dégâts. Tout cela était infiniment amusant. Sa position en tant que ranger lui permettait de disparaître la journée, prétendument au travail dans les étendues sauvages, mais en fait dans une planque à l’abri des rayons du soleil. Il s’arrangeait ensuite pour faire son travail la nuit. Grâce à ses dons de vampire, ses états de service étaient excellents. Il s’était fait une réputation et était occasionnellement appelé au 75e régiment de Rangers pour certaines missions sur le territoire. Un jeu fort divertissant. Dommage de devoir disparaître dans quelques années. Peut-être retournerait-il alors au Canada. Ou en Amérique du Sud, ce continent lui était encore inconnu. Il pourrait toujours suive des cours accélérés d’espagnol quand le besoin s’en ferait sentir.

Il prit son verre et, sous couvert de humer les arômes du whisky, il ferma les yeux et s’emplit les poumons de l’odeur de la jeune fille, afin de pouvoir la traquer si besoin. Son parfum *coûteux !* masquait la majorité de ses effluves corporels, mais il parvint néanmoins à trouver une trace de senteur naturelle au milieu du pot-pourri de fleurs du parfum et d’alcool. Elle avait une odeur étrange, quelque chose qu’il n’avait encore jamais senti chez d’autres humains auparavant. Cela fait, il rouvrit les yeux et prit une gorgée de liquide ambré en se délectant de son goût unique.

Il regarda Savannah dans les yeux *boit-elle ce cocktail parce qu’elle sait que ses yeux sont assortis à sa couleur ou bien pour son goût ?* et ajouta : « Mais mon travail n’est pas très intéressant et ce sujet de discussion pourrait très vite lasser une si charmante jeune femme. Parlons plutôt de vous. Vous venez ici souvent ? » Il écoutait les battements de son cœur *en pleine forme la demoiselle, je me demande quel goût elle a* en l’observant afin d’en apprendre plus sur elle et de repérer un gri-gri, tatouage, anneau pendentif ou quoi que ce soit d’autre qui pourrait révéler sa nature de sorcière. Il la dévorait littéralement des yeux. *Si elle s’habille ainsi, c’est qu’elle doit aimer qu’on la regarde.* Et un compliment accompagné d'un léger sourire ne faisait jamais de tort : « Vous a-t-on déjà dit que vous étiez ravissante ? »

Michael & Seeliah
«Dans chaque petite chose, il y a un ange.»
[Georges Bernanos]

L’ange l’avait écouté lui répondre sans réel intérêt pour ce qu’il faisait, car au fond elle se fichait pas mal de savoir quoi que ce soit sur lui. Ce qui comptait pour la demoiselle c’était de le mettre dans ses filets. Mais pour cela, elle avait fait mine de l’écouter attentivement, secouant légèrement la tête de haut en bas, juste pour lui montrer qu’elle suivait, même si ce n’était qu’à demi-vrai.

Enfoncée confortablement dans son fauteuil, son verre de cocktail, dont elle faisait tournoyer le liquide bleuâtre lentement dans son récipient, entre les mains, elle regardait fixement les iris sombre de l’homme en face d’elle. Le sourire mutin, elle ne répondit rien, le laissant parler, l’observant la regarder, l’observant humer son verre de whisky, l’observant dans les moindres détails, comme pour mieux tenter de le cerner. Bien souvent, cette façon d’appréhender la personne à qui elle avait à faire lui suffisait pour se faire une très bonne opinion quant à la qualité de cette personne. Mais avec Michael, c’était différent, elle n’arrivait pas à se faire une idée sur lui, elle n’arrivait pas à lire dans ses gestes ou ses mimiques. Il n’était pas dépourvu d’indications le concernant, on voyait tout de suite qu’il était quelqu’un de bien éduqué, de courtois et toute ces choses qui rendent un homme respectable. Mais Seeliah, peinait à en savoir davantage, il semblait avoir le contrôle parfait sur lui-même, pour ne rien divulguer de lui au travers de gestes ou mots qui seraient susceptible de le trahir. Cela renforça encore une fois la conviction de la blondinette qu’il ne pouvait être humain. Cet homme avait une bien trop grande maîtrise de lui-même pour être humain. Ce qui augmenta d’autant l’attrait qu’il avait aux yeux de l’ange. Elle n’avait plus qu’une envie, en savoir plus et découvrir ce qu’il était.

- Depuis quelques temps, oui. Même si tout le monde n’est pas d’accord avec ça. Mais je me passe de l’accord de qui que ce soit pour faire ce que j’ai envie.

Elle émit un petit rire malicieux. Jouer sur sa jeune apparence, laisser entendre qu’il y avait des parents derrière elle, mais qu’elle passait outre leur autorité était marrant. Après tout, elle s’était présenté comme étant Savannah, la petite adolescente humaine et non pas comme étant Seeliah, l’ange qui habitait ce corps frêle et innocent. Du moins plus si innocent que ça maintenant. Bien sûr, faire référence, même subtilement à son âge risquait peut-être de le voir s’enfuir, mais l’ange aimait les défis, aimait jouer avec le feu.

Les yeux baissés le temps de quelques secondes, un faux sourire gêné et timide s’esquissa sur ses fines lèvres au rouge à lèvres d’une couleur rouge cerise vive et éclatante, après qu’elle ait reçu ce divin compliment.

- Oui, assez souvent. Mais j’avoue ne pas ma lasser qu’on me le dise. Surtout lorsque cela vient d’un homme aussi charmant et courtois que vous.

Seeliah avait relevait le visage, affichant cette fois un air bien plus confiant, sa voix était clair, légèrement plus grave que la moyenne pour une fille. Elle avala une gorgée de son cocktail, décroisa ses jambes lentement, pour les recroisés à l’inverse toute en subtilité. Inutile de jouer les fausses prudes plus longtemps, ses habits et son maquillage parlaient pour elle de toute manière. Et même si elle s’était présentait sous le nom de Savannah et qu’elle en avait l’apparence, c’était bien l’ange qui se trouvait là et tentait de captiver l’attention de Michael, auquel elle avait subtilement renvoyé le compliment. Ce qui était semble-t-il nécessaire pour qu’il sache qu’elle aussi était intéressée.

- Veuillez m’excuser un instant.

La blonde se leva, posa son verre sur la table basse, en prenant bien soin de se pencher quelque peu, dévoilant son décolleté sous un autre angle, puis se redressa, remettant en place sa courte jupe. Seeliah tourna le dos au jeune homme et se dirigea vers les commodités, se frayant un chemin parmi la foule présent dans le club, pour se refaire une beauté, retouchant son maquillage ça et là. Le but n’était pas réellement de parfaire ce qui était déjà parfait et n’avait pas bougé depuis le début de la soirée. Le vrai but de cette petite escapade, était de faire languir Michael, de se faire désirer, de le faire penser à elle, le temps que durait sa petite absence, le faire se poser des questions.

- Je n’ai pas été trop longue j’espère ?

L’ange était réapparut quelques minutes plus tard, pas plus de cinq minutes sans doute, il fallait se faire désirer, mais ne pas l’impatienter pour autant au risque de le voir partir avant d’avoir eu le temps de revenir. Tout sourire, la bouche en cœur, elle se rassit dans son fauteuil, recroisa les jambes avec la même désinvolture que plus tôt. Elle se pencha pour reprendre son verre au contenu assorti à la couleur de ses yeux, leva le verre en direction de Michael, puis bu le reste du cocktail en une gorgée.

Visiblement, la demoiselle le trouvait à son goût. Elle l’observait avec un intérêt et une curiosité à peine voilés. *Ainsi donc, la petite dame est là sans l’accord parental. Cette graine de rebelle ferait bien d’apprendre à rester chez elle le soir.* L’idée de dévoiler ses crocs pour la voir détaler lui traversa l’esprit, mais il se contenta d’un fin sourire. S’il voulait conserver sa couverture, personne ne devait savoir qui il était.

*Charmant ? Courtois ?* « Cela fait bien longtemps que plus personne ne m’a qualifié comme tel. »

Il essayait de trouver un moyen de tourner la conversation vers le sujet des sorcières de l’endroit sans éveiller des questions indésirables, quand la jeune femme commença son numéro de séduction. *Plutôt bien exécuté pour une débutante. Serait-elle plus âgée que ce qu’elle y parait ?* Il joua le jeu et la regarda franchement, après tout, une telle démonstration se devait d’avoir un public attentif. Et en parlant de public, quelques autres clients de l’endroit commençaient à délaisser les danseuses professionnelles pour se concentrer sur un autre genre de danse, celle dont lui et Savannah avaient fait les premiers pas. Il réajusta sa position sur la chaise, s’assit de manière plus décontractée, une main jouant avec son verre et l’autre posée sur la table, légèrement tendue en direction de Savannah, afin qu’elle puisse la prendre si elle le désirait. Malheureusement, elle choisit ce moment pour aller se repoudrer le nez. Même si d’après ce qu’il pouvait voir, et il avait une vue excellente, elle n’en avait nullement besoin. La vue plongeante qu’elle lui offrit et le doux balancement de ses hanches alors qu’elle s’éloignait en valait la peine. Elle était beaucoup moins innocente qu’il n’y paraissait et semblait prendre plaisir à émoustiller les sens des gars du coin. Elle avait une démarche très sûre d’elle, beaucoup plus que la majorité des adolescentes qui tentent de cacher leurs formes, ou ; qui, si elles les montrent, le font de manière vulgaire. Il y avait un art consommé dans sa façon de séduire, il n’était pas le premier vers qui elle tendait ses filets.

Le genre humain ne l’étonnait plus depuis longtemps, mais ce petit brin de femme était parvenu à l’intriguer. Cette combinaison d'innocence et de provocation lui fit se demander comment se terminerait la soirée. Il avait bu avant de venir dans cet endroit, mais il ne s’attendait pas à se retrouver dans le lit d’une jeune lupa, au sens romain du terme, dès son arrivée. Cela faisait une éternité qu’il n’avait plus joué de cette façon avec ses proies. Il leur préférait la chasse, une poursuite sans espoir pour eux, mais voir la lumière s’éteindre dans leurs yeux alors qu’il les rattrapait au dernier moment était toujours jouissif. Il ne savait pas s’il serait en mesure de garder le contrôle si Savannah l’emmenait dans son lit ce soir. Elle savait s’y prendre pour appâter le gibier.

Quelques minutes plus tard, la belle revenait s’asseoir à ses côtés, et vidait son verre d’un seul trait.

Elle s’inquiétait de l’avoir fait attendre. « Ne vous inquiétez pas pour ça, cher ange, je passerais l’éternité à vous attendre que le temps ne paraitrait pas trop long. Désirez-vous un autre verre, ou préférez-vous continuer cette conversation dans un lieu plus… privé ? » Répondit-il avec un sourire. *Un ange ! Ah ! Un démon de la séduction plutôt ! Que je sois damné si cette fille va au paradis à l’heure de sa mort !* Oh, bien sûr, damné, il l’était déjà, c’est du moins ce que semblaient penser certains auteurs de ‘littérature’ comme madame Rice et ses collègues. Tout ce qu’il savait c’est qu’on lui avait offert l’éternité et qu’il comptait bien en profiter un maximum avant d’atterrir Dieu seul sait où. Pour l’instant, il s’en fichait éperdument. Le Bien et le Mal, le Paradis et l’Enfer sont des notions très floues et après tout, les vainqueurs écrivent l’histoire et décident de ce qui est bien ou mal. Si Hitler avait gagné sa guerre, on appellerait probablement un bienfait les fours et les camps de concentration. Mais il avait échoué et on l’avait traité de monstre.

Il comptait bien ramener la jeune Savannah à la maison et lui expliquer qu’on ne couche pas avec un inconnu le premier soir, surtout quand cet inconnu est plus âgé que vous et pourrait profiter de votre faiblesse. Si cela ne la dissuadait pas, hé, bien il serait toujours temps d’aviser à ce moment.

Michael & Seeliah
«Dans chaque petite chose, il y a un ange.»
[Georges Bernanos]

La blonde fut quelque peu surprise par l’appellation que venait d’utiliser Michael. Elle ne savait pas trop s’il l’avait perçait à jour et qu’il tentait de cette façon de le lui faire comprendre. Ou si c’était seulement un surnom donné de façon purement intentionnel dans son jeu de séduction. Comment devait-elle réagir ? Il était tellement impassible, Seeliah n’arrivait pas à déchiffrer ce que disait son regard. Il maîtrisait trop bien, trop parfaitement ses émotions pour un humain, et s’il n’était pas humain, alors peut-être avait réellement deviné la nature angélique de la blondinette. Mais avant de se dévoiler, il fallait qu’elle s’assure de ce qu’il savait, ou du moins ce qu’il croyait savoir et surtout qu’elle cherche elle-même à savoir qu’elle créature il était lui-même. Quoiqu’il en soit, elle appréciait énormément ses manières, sa façon de faire, d’agir, il était définitivement d’un autre temps. Les hommes d’aujourd’hui n’agissait plus de manière si raffinée. Bien sûr, ils avaient toujours de belles paroles pour vous embobiner, mais Michael avait une façon bien précise de s’exprimer qui ne correspondait pas du tout à l’époque actuelle. C’était aussi inattendu qu’appréciable qu’elle ne pouvait décemment pas refuser de poursuivre cette conversation avec lui.

- Un autre verre, dans un lieu plus privé me conviendrait parfaitement.

Il avait si bien réussi à la charmer, que Seeliah le suivrait où il le souhaiterait. Après tout, sa nature angélique lui assurait une certaine protection qui lui permettait par là même, de ne pas avoir à user de prudence. Le corps de Savannah était vraiment très pratique pour s’amuser, son apparence frêle appelait à laisser croire qu’elle se devait de faire attention, mais seulement, sa fragilité n’étant qu’apparente puisque possédant la force et la résistance surnaturelle de l’ange, elle ne se privait jamais de fricoter avec le danger qui rôdait un peu partout. A vrai dire, elle l’aimait, le cherchait et l’attirait d’une certaine façon, volontairement à elle. Il semblerait que ce soir ce danger avait prit les traits de ce charmant homme qui se nommait Michael, elle n’avait juste pas encore réussi à identifier la nature même de l’objet de sa convoitise.

- Je vous suis. Où allons-nous ?

Seeliah n’était vraiment pas du genre à perdre son temps et était plutôt quelqu’un d’assez direct selon les circonstances. Elle s’était donc déjà levée de son assise et son sac à main en cuir noir en main, elle était déjà prête à se diriger vers la sortie pour récupérer sa veste et sortir du cabaret. Peu importe le lieu que Michael choisirait de l’emmener, elle savait d’avance que l’endroit ne manquerait pas de goût et d’élégance. Elle ne le connaissait pas encore vraiment, mais il était indéniable qu’il en fut autrement.

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